Extrême droite autrichienne : jusqu’où ira la haine envers les musulmans ?
L’Autriche est célèbre pour ses marchés de Noël. Des touristes du monde entier s’y pressent et la capitale autrichienne, pourtant gouvernée par les socialistes, se fait discrète lorsque, dans une démarche fort peu chrétienne, elle interdit la vente du principal journal des sans-abris sur lesdits marchés (cf. ce billet). Régulièrement, ces marchés sont instrumentalisés par l’extrême droite qui insiste pour que la dimension chrétienne soit mise en évidence, mais pas dans le sens du partage. Pas question en république alpine d’évoquer un « sapin de Noël » (les Allemands parlent couramment d’un « arbre de Noël », Weihnachtsbaum) : ici on ne trouve que des Christbaüme, des « arbres du Christ » (cf. ce billet). De même, le marché de Noël s’appelle Christkindlmarkt : « marché de l’enfant Christ ».
La dernière trouvaille du parti d’extrême droite, le FPÖ (parti libéral d’Autriche) a été de critiquer la forme des stands sur le marché de Noël d’un arrondissement très populaire de la capitale, Favoriten. Lire la suite
Du NSDAP au FPÖ, au bal des chasseurs
Le principal parti d’extrême droite autrichien, le Parti de la liberté (FPÖ) a été fondé à Vienne le 7 avril 1956. Selon le politologue Anton Pelinka, tous les membres fondateurs à l’exception d’un seul étaient d’anciens nazis. C’est parmi ces fondateurs qu’on trouve le premier président du FPÖ, Anton Reinthaller, né à Mettmach, en Haute-Autriche, en 1895, et dont l’histoire est typique de l’Autriche. Dès le 11 mars 1938, il est nommé ministre de l’agriculture et des forêts dans le gouvernement d’Arthur Seyß-Inquart chargé de mettre en place « l’Anschluss » (le mois suivant il sera également député au Reichstag puis secrétaire d’Etat à Berlin). Dans l’édition du 26 mars 1938 du journal Bauernbündler, page 2, il est présenté comme ayant adhéré au NSDAP dès 1923, ayant « courageusement » poursuivi, dans une période de « résistance », la politique du parti lorsque le NSDAP était interdit en Autriche, de 1933 à 1938. Sur cette page du journal, la carte du Reich (ci-dessus) est éloquente.
Lorsqu’Anton Reinthaller préside le comité d’honneur du Bal des chasseurs, Lire la suite
Le gouvernement autrichien impuissant face aux néonazis
En Autriche, à côté des célèbres « Burschenschaften » comme Olympia, Vandalia, Teutonia ou Moldavia, ces corporations étudiantes exclusivement masculines, pangermanistes, où se révèlent les liens entre le parti d’extrême droite (FPÖ) et divers groupuscules néonazis ou négationnistes, il y a également des corporations qui regroupent d’anciens lycéens, les « pennalen Burschenschaften ». « Germania » est le nom de l’une d’entre elles et jusqu’au 24 janvier 2018, son vice-président en Basse-Autriche n’était autre qu’Udo Landbauer, le responsable de l’organisation de jeunesse du FPÖ de 2011 à 2018 et surtout le candidat du FPÖ aux élections régionales de Basse-Autriche prévues le 28 janvier prochain. Or, l’hebdomadaire Falter a révélé mardi 23 janvier le contenu du livre de chant imprimé en 1997 et utilisé par les membres de cette organisation. A la page 182 on lit « Le juif Ben Gourion arrive parmi eux : ‘Allez les Germains, mettez les gaz, on va réussir à atteindre le septième million’ » puis Lire la suite
L’extrême droite au pouvoir en Autriche, plus forte que jamais
On se souvient encore de la participation du parti de Jörg Haider au gouvernement, de 2000 à 2006, et du concert de protestations que cela avait suscité, tant à l’intérieur du pays qu’à l’extérieur, notamment au niveau européen, du moins jusqu’à ce que l’extrême droite se renforce en Italie. Cette fois-ci, suite aux élections législatives du 15 octobre dernier, l’extrême droite représentée par le Parti de la liberté (FPÖ) obtient le poste de vice-chancelier pour le président du parti, Heinz-Christian Strache mais aussi deux ministères régaliens, l’intérieur pour Herbert Kickl, l’idéologue représentant la ligne dure du parti (auteur des slogans comme « plus de courage pour notre sang viennois » ou « la patrie plutôt que l’islam ») et la défense pour Mario Kunasek qui dirigeait jusqu’alors le FPÖ d’une main de fer en Styrie. Et ce n’est pas tout, les affaires étrangères sont confiées à Karin Kneissl, une proche du parti qui explique par le niveau de testostérone des hommes musulmans la géopolitique du Moyen-Orient et le danger que représentent, selon elle, les demandeurs d’asile (voir son livre La testostérone fait de la politique, paru en 2012). Lire la suite
Coup de barre à droite et résurgence de vieux démons
Huit jours avant les élections législatives anticipées, le très jeune candidat conservateur Sebastian Kurz (31 ans) s’exprimait en ces termes, à Graz, dans la province de Styrie : « le 15 octobre sera aussi un référendum pour savoir quel style on veut dans ce pays, si on veut les Silberstein et les autres, ceux qui essayent de diffamer leur adversaire politique et de les réduire à néant (…). ».
« Les Silberstein »
Les électrices et électeurs ont bien sûr compris qu’il s’agissait d’une référence au conseiller israélien en communication et marketing politique, Tal Silberstein, arrêté le 14 août dernier par la police de son pays pour des scandales de corruption dans plusieurs pays. Ancien conseiller des premiers ministres Ehud Barak et Ehud Olmert, Tal Silberstein était aussi l’homme de confiance de nombreux dirigeants en Roumanie, en Ukraine (Ioulia Tymochenko) et depuis longtemps en Autriche. Lire la suite
Déjà vu
« Déjà vu » est une expression qu’on utilise aussi en allemand et en ce mois de juin 2015, c’est une manifestation du principal parti d’extrême droite, le FPÖ, qui est entrée en résonance avec un événement datant d’avril 1938. L’installation de Ruth Beckermann « L’image manquante » (mise en place en mars dernier et présentée dans ce billet) montrait les visages des Autrichiens se moquant des Juifs en train de brosser le sol avant le référendum validant l’Anschluss. Il s’agissait pour l’artiste d’illustrer et surtout de donner à voir ce sentiment de haine et de supériorité qui s’affichait sur les visages. Reprenant les photos du journaliste John Sobek des manifestants d’extrême droite opposés à l’arrivée des réfugiés au centre d’accueil de Vienne, dans le troisième arrondissement, Ruth Beckermann a modifié pendant 24 heures son installation, utilisant pendant ce court laps de temps le titre « déjà-vu » pour montrer ces visages-là (cf. ces photos). Le parallèle peut choquer puisqu’on sait aujourd’hui que ces séances d’humiliation ont servi de préludes à une extermination systématique des Juifs d’Europe (« Shoah« ). Aujourd’hui, la colère des militants du FPÖ ne s’adressait pas directement à l’encontre des demandeurs d’asile et il n’y a pas volonté d’anéantir les réfugiés, ni de les considérer comme des ‘Untermenschen‘… quoi que… lorsqu’on entend (vidéo ci-dessous) la député du FPÖ en charge des affaires sociales, Dagmar Belakowitsch-Jenewein, demander le 17 juin dernier au parlement que les expulsions se fassent en avions militaires pour ne pas que le pilote puisse refuser d’embarquer des demandeurs d’asile récalcitrants, on peut se mettre à douter. Lire la suite
L’Union européenne ? Un « conglomérat de nègres » !
L’Union européenne serait une « dictature » à côté de la laquelle le « Troisième Reich serait probablement informel et libéral ». La Commission européenne devrait se demander si elle n’est pas devenue « un conglomérat de nègres » aux mains d’une « bande de lobbyistes ». Tels sont les propos rendus publics le 21 mars et tenus le mois précédent par Andreas Mölzer, député européen du FPÖ, le principal parti d’extrême droite en Autriche. A ce jour, M. Mölzer est en outre tête de liste aux prochaines élections européennes. Interrogé sur ces extraits, il a commencé par nier les propos mais une fois l’enregistrement écouté il a estimé qu’il s’agissait d’une « défaillance linguistique » de sa part et a fini par s’excuser. Lors d’une conférence de presse agitée, le mardi 25 mars au matin, le chef du parti, Heinz-Christian Strache, a estimé que l’affaire était close et que M. Mölzer devait rester à la tête de la liste de son parti. Selon lui le député ne voulait que critiquer la folie régulatrice de la Commission européenne.
Les propos de M. Mölzer ont été tenus pendant la soirée du 18 février au Palais Epstein, annexe du Parlement. Il s’agissait de la présentation d’un livre de Barbara Rosenkranz, candidate du FPÖ aux élections présidentielles de 2010. C’est elle qui expliquait qu’elle ne pouvait pas se prononcer sur l’existence des chambres à gaz puisqu’elle n’avait, comme beaucoup de ses compatriotes que le bagage classique reçu à l’école entre 1964 et 1976. Ce soir-là on trouvait aux côtés de M. Mölzer et Mme Rosenkranz, Wolfgang Dvorak-Stocker (éditeur proche des milieux négationnistes) et Lothar Höbelt, historien de l’université de Vienne proche du FPÖ.
Dernier point (relevé nulle part à ma connaissance), le journaliste qui a enregistré M. Mölzer le 18 février est un journaliste allemand qui travaille pour le Süddeutsche Zeitung. Comment expliquer le fait qu’aucun journaliste autrichien n’ait signalé l’énormité des propos ? Il en allait de même en 2009 lorsqu’un graffiti antisémite présent depuis des mois était découvert sur le monument à la mémoire des pères fondateurs de la Première république autrichienne (cf. ce billet). Heureusement que l’Autriche héberge quelques étrangers !
Le 8 mai en Autriche…
« C’est pas férié chez vous, le 8 mai ? » C’est souvent ce qu’on me demande à l’approche du 8 mai, depuis près de 7 ans que je vis en Autriche. Lorsque je vivais en Allemagne (1994-2000), c’était la même chose mais ma réponse était simple, « non, ici il n’y a rien le 8 mai, mais cela devrait effectivement être férié, comme jour de la Libération ». En Autriche, hélas, il y a bien quelque chose le 8 mai : les Burschenschaften (corporations pangermanistes) se réunissent sur la Heldenplatz pour pleurer la fin de la guerre (La Heldenplatz c’est la « Place des héros », la place la plus emblématique de Vienne, celle-là même où Hitler fut accueilli en grande pompe le 15 mars 1938). Tout ce que l’Autriche compte de néonazis se recueille lors d’une marche aux flambeaux, pour honorer les pauvres soldats et membres de la SS, morts pendant la guerre. Cette année, ils appelaient pour la première fois à honorer « toutes les victimes », mais personne n’était dupe. Une contre-manifestation était organisée par les jeunes socialistes, les Verts et la représentation officielle de la communauté juive d’Autriche (l’IKG). De nombreux « autonomes » et antifascistes se sont joints à cette contre-manifestation. La police s’est interposée entre les néonazis et ces sympathiques manifestants. Autriche, terre de contrastes.
Un (autre) gratuit qui « offre »… de la xénophobie !
Ignoble ! Il y a quelques jours, je reproduisais déjà la une de Heute, le gratuit du métro qui promeut régulièrement la xénophobie. Le 29 novembre, c’est le quotidien Österreich qui rendait compte de la votation en Suisse instaurant un renvoi immédiat (sans procédure d’appel) pour les étrangers criminels (la fraude aux assurances sociales suffit pour ce qualificatif). Österreich n’est pas vraiment un gratuit : il est en vente dans les kiosques mais on le trouve aussi, gratuitement, dans bon nombre de stations de métro ou de lieux publics. Leur titre, en gros : « Les étrangers criminels dehors, tout de suite ! ». Ce n’est qu’au-dessus qu’on comprend qu’il s’agit de la Suisse, avec « les Suisses ont voté ». Pire encore, à gauche on trouve une Suissesse qui jubile et, à droite, le leader du parti d’extrême droite autrichien, le FPÖ de Heinz-Christian Strache ! Comme on le voit sur la une, ils lui offrent une tribune avec « Le FPÖ démarre une initiative populaire ». Beurk, je ne vois rien d’autre à ajouter.
Une affiche de l’extrême droite pour défendre le sang viennois…
La campagne pour les municipales (prévues le 20 octobre à Vienne) débute mal. En rouge, « Plus de COURAGE pour notre sang viennois » (Wiener Blut) et en noir, « trop d’étrangers, cela ne fait du bien à personne ». Je suis tombé sur cette affiche le 14 août en courant dans Vienne (grand tour de 62 km, diaporama). J’ai été tellement choqué que je me suis arrêté pour prendre une photo avec mon téléphone.
Sur la campagne du FPÖ, voir sur ce blog « la police au service de l’extrême droite« .
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