Une femme extraordinaire, Anita Lasker-Wallfisch
Jeudi 10 mars, pendant que s’ouvrait à l’institut français de Vienne le colloque sur « la musique, la politique et le national-socialisme en Europe » (évoqué dans le billet précédent), Anita Lasker-Wallfisch était elle invitée à l’université populaire de Meidling, un quartier pluriethnique de Vienne où j’ai le plaisir d’habiter. Mme Lasker-Wallfisch est la dernière survivante connue de l’orchestre de femmes d’Auschwitz. Née à Breslau en 1925, elle a assisté à l’arrestation de ses parents en avril 1942 (ils ont été assassinés peu après). Placée en orphelinat avec sa soeur Renata, elle s’est engagée à 16 ans dans la Résistance. Les deux soeurs ont été arrêtées à leur tour en septembre pour avoir fabriqué de faux-papiers et déportées à Auschwhitz où elle survécurent grâce à la musique : à l’arrivée, Anita a indiqué qu’elle jouait du violoncelle et a pu ainsi rejoindre l’orchestre d’Alma Rosé. A l’arrivée des troupes soviétiques, elle fut ensuite déportée à Bergen-Belsen et y vécut l’enfer. En Grande-Bretagne, elle participa ensuite à la fondation de l’English Chamber Orchestra où elle joua jusqu’à la fin des années 1990.
La salle de l’université populaire était pleine (550 personnes), beaucoup de classes mais pas seulement (cf. ce compte-rendu). C’était la première fois qu’Anita Lasker-Wallfisch intervenait devant un large public en Autriche (elle a mis plus de 40 ans à revenir en Allemagne, de peur de croiser les assassins de ses parents). Lors des nombreuses questions, une élève lui a demandé comment elle avait réussi à « tenir » dans les camps, s’il y avait une philosophie de vie à adopter pour que cela ne se reproduise plus. Sa réponse fut émouvante : « Mon père disait toujours, apprenez, apprenez… Tout ce que vous possédez, on pourra vous le prendre. Ce que vous avez mis dans votre tête, personne ne pourra y toucher. »
Compléments : son témoignage en anglais et son autobiographie, La Vérité en héritage. La Violoncelliste d’Auschwitz (Albin Michel, 1999).
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Après la guerre et la libération du camp, une polémique naîtra entre divers survivants de l’orchestre. Si l’on en croit la pianiste Fania Fénelon (en), Alma aurait usé voire abusé de ce pouvoir aux dépens des musiciennes[1]. De son côté, la violoncelliste Anita Lasker-Wallfisch prit sa défense, précisant qu’Alma n’avait rien fait d’autre que d’essayer de préserver la vie de ses compagnes de l’indicible[2].
Merci pour votre commentaire. Lors des questions, une élève a demandé à Anita Lasker-Wallfischsi pourquoi dans le livre de Fénelon, elle était appelée Marta. Réponse d’ALW : laseule chose à faire avec ce livre, c’est le jeter dans la poubelle la plus proche. Elle a expliqué que Fania Fénelon n’avait consulté personne avant de raconter ce qui s’était passé, que c’était romancé, avec des erreurs manifestes etc.
Cf. http://en.wikipedia.org/wiki/Women's_Orchestra_of_Auschwitz
Bien cordialement,
JS
très émouvant compte-rendu!
l’autobiographie doit être très enrichissante!
quelle belle rencontre cela a été!
Belle personne et beau témoignage .. Merci pour ce partage de mémoire et de résistance !
Lu avec intérêt, je ne savais rien de la vie de cette héroïne qui mérite tant que l’on parle d’ elle…